Trois mets à déguster avec du vin jaune, avec Olivier Grosjean

 

 

On le surnomme « L’Or du Jura », tant pour sa couleur que pour sa rareté. Doué d’une complexité aromatique hors du commun, le vin jaune est conçu à partir du cépage Savagnin, et a une particularité bien à lui : durant son élevage qui dure plus de six ans, les fûts ne sont pas complètement remplis. La « part des anges » n’est ainsi pas compensée par ouillage, afin de permettre l’apparition d’un voile de levures qui le protège de l’air et le nourrit. C’est de cette méthode – découverte par hasard – que résulte un nectar doré devenu mythique. Olivier Grosjean, auteur de nombreux ouvrages sur la vigne, dont le Le vin jaune, dix façons de l’accompagner, revient sur ce vin blanc, si sacralisé que nombreux n’osent déguster leurs références, précieusement stockées en cave. L’écriture de ce livre s’est imposée à lui pour inciter à libérer les bouteilles des bouchons, en conseillant quoi mettre dans l’assiette en accompagnement. « L’oxydation est souvent vue comme un défaut, pas une qualité. Le vin jaune n’est pas très facile à boire, il arrive même que certains pensent que la bouteille n’est plus bonne, si on ne leur a pas expliqué… » sourit-il en préambule. Quels mets choisir pour accompagner une dégustation de l’or du Jura ? Olivier Grosjean a répondu à Vin Fins.

 

Avant d’en venir à vos trois suggestions, vous nous raconteriez un souvenir de dégustation de vin jaune ?
Il y a quelques années j’ai été invité à Château-Chalon, dans le Jura, pour une remontée spectaculaire dans le temps sur le thème du vin jaune. Nous avions eu la chance, ce jour-là de goûter une bouteille de 1886. C’est un vin qui a une capacité extraordinaire à vieillir, qui sait défier le temps. Et déguster de si vieux vins jaunes fait entrer dans une toute autre dimension. Nous avions terminé cette découverte par une des recettes incontournables : un coq au vin jaune.

 

Premier accord : un vieux comté
« L’accord de choix reste à mon sens régional. Associé à un vieux comté, le vin jaune fonctionne très bien car les notes se répondent : les arômes de noix du vin forment un ensemble harmonieux avec la force du fromage, l’acidité du vin répond bien à la texture du comté. De fait, il peut aussi être dégusté avec d’autres fromages à pâte dure comme du parmesan ou du cantal. »

 

Second accord : un plat thaïlandais
« C’est un accord que je considère largement sous exploité : le vin jaune (et le savagnin en général) se marie bien avec la cuisine thaïlandaise, particulièrement relevée. Il est souvent difficile de savoir quoi boire en matière de vin sur la cuisine asiatique, car elle l’emporte souvent sur les arômes du vin. Le vin jaune a du répondant sur le plat, il n’est pas écrasé par les épices, il s’accorde aussi très bien avec le curry. »

 

Troisième accord : un poulet aux morilles
« Un poulet, mais pas n’importe lequel : un poulet cuisiné au vin jaune ! C’est un moyen extraordinaire de sublimer cette volaille, mais attention : les arômes du vin jaune sont thermolabiles, c’est-à-dire qu’ils s’évanouissent s’ils cuisent. Il faut donc ajouter un verre de vin jaune en fin de cuisson, juste pour ses apporter ses arômes si particuliers au plat. Ensuite, on le boit en dégustant le plat, et l’accord se fait naturellement. Et certaines vieilles références développent des arômes de morilles, si vous en mettez dans le plat, l’acidité du vin viendra lui répondre à merveille. »

 

 Arbois Vin Jaune chez NICOLAS