Spiritueux gourmands pour passer l’hiver

 

 

Les spiritueux ont leur saison, et quand la terre blanchit sous les flocons, certains sont préférés à d’autres. Du côté de chez Aude et André Carimalo, cavistes Nicolas depuis 1992 et co-gérants de la cave de Thoiry, non loin de Genève, c’est la Chartreuse qui réchauffe les cœurs. Le couple, qui a fait ses armes dans la restauration, est un duo de curieux gourmets qui connaît tous ses produits sur le bout des doigts. Toutefois il existe autant de possibilités que de personnalités. Alors lorsque l’hiver est installé, avec ses températures basses et ses cheminées au pic de consommation, quels grands spiritueux déguste-t-on à l’apéritif et en digestif ? Aude et André partagent leur expertise et leurs conseils avec Vins Fins.

 

Quels spiritueux sont populaires en hiver, et pourquoi ?
L’hiver, les gens se tournent vers des spiritueux gourmands : des liqueurs aux épices, des alcools qui rappellent la montagne, comme la Chartreuse ou le Génépi, faits à base de plantes, qui apportent un côté médicinal au plaisir du digestif. Mais aussi tout ce qui est chaleureux et qui se déguste bien devant un feu de cheminée, comme l’armagnac ou le cognac. En cette saison, on vend beaucoup plus de whisky tourbé et boisé, ou de rhums épicés à la cardamome, à la cannelle, au gingembre, qui rappellent les notes que l’on trouve dans la gastronomie en cette période de l’année. De manière générale, ce sont les alcools bruns qui ont le plus de succès, sûrement parce qu’ils donnent l’impression de se réchauffer.

 

Avec des plats riches et réconfortants, que conseilleriez-vous de déguster ?
Souvent, on déguste les spiritueux en marge de ces repas riches et réconfortants. Parmi les classiques de l’hiver, il y a le bœuf bourguignon, qui peut être suivi d’un armagnac ou d’un cognac. Après un plat de montagne comme une fondue ou une raclette, nous conseillons plutôt un alcool local, comme une Chartreuse. Après un cassoulet, des pruneaux à l’armagnac fonctionnent très bien pour clore le repas. Et si l’on aime le poisson fumé ou encore le gravlax, souvent dégustés à la saison hivernale, le whisky sera le plus indiqué. Qu’il soit tourbé ou plutôt iodé, les deux s’y accordent parfaitement.

 

Pourquoi ce saint a-t-il été choisi par les vignerons ?
Aucun texte ne permet de définir l’origine de son patronage auprès de la corporation des vignerons. On remarque simplement qu’à partir du XVIe siècle, l’imagerie populaire le représente encadré de deux ceps de vigne, portant des grappes de raisins, ou en train d’enseigner aux vignerons l’art de cultiver la vigne. Plusieurs hypothèses ont été formulées quant à ce choix. Certaines sont des légendes, d’autres sont plus probables. Il serait associé au vin en raison de l’identité entre ce mot et la première syllabe de son nom : Vin-Cent (le saint rendant le vin au centuple), ou encore Vin-Sang (pour le sang du Christ). On invoque bien sainte Claire pour les maladies des yeux, Saint Loup pour les maladies liées à la peur… Autre possibilité : il aurait été associé à la vigne parce que sa fête tombe le 22 janvier, une époque marquant la fin du repos hivernal et réputée favorable pour le début de la taille. Il faut aussi noter que l’Église est elle-même viticultrice à l’échelle locale, et qu’elle a pu encourager ce patronage en rapprochant les qualités du diacre avec la ténacité et la patience du vigneron.

 

Pour offrir un spiritueux à quelqu’un dont on ne connaît pas les goûts, vers quoi conseillez-vous de s’orienter ?
On ne peut pas répondre à cette question sans s’intéresser au profil de celui ou celle qui va recevoir ce cadeau. Est-ce quelqu’un de posé, qui apprécie de bons repas ? Est-ce une personne jeune, qui a l’habitude de sortir ? La façon dont ce spiritueux peut être bu, et avec qui, va orienter le conseil. Si c’est quelqu’un qu’on a déjà vu boire des cocktails, on s’orientera plutôt vers un bon gin artisanal par exemple, si c’est une personne qui apprécie l’alcool après le dîner, on privilégiera un armagnac ou un cognac. De la même manière, l’âge a son importance, on ne boit pas la même chose si l’on a trente ou cinquante ans… Chez nos parents, il y a toujours un apéritif au whisky, chez nos enfants, plutôt un apéritif avec du rhum ! Il y a de nombreux paramètres à prendre en compte. Si l’on est face à quelqu’un de curieux, qui a le goût de l’aventure, nous conseillons un rhum venu de Thaïlande, ou un whisky conçu en Chine.

 

Pour avoir un bar à spiritueux d’hiver qui sache faire plaisir à tous types d’invités, que conseillez-vous d’acheter ?
Pour avoir un bon équilibre dans son bar, il faudrait avoir quelque chose de léger, quelque chose de sec et quelque chose d’épicé. Alors, nous conseillons de se constituer une petite collection avec une liqueur à base de plantes, soit une Chartreuse, un génépi ou une Bénédictine. Un alcool plus sec, comme une vieille prune, un cognac Hine XO ou un armagnac Laubade par exemple. Et pour terminer, un rhum épicé, comme un Ron Dictador XO Aurum, ou encore un Diplomatico Ambassador.

 

photos ®Estelle Perdu