Plongée dans la Champagne de Sophie Claeys

 

 

Entre autres règles historiques qui font l’appellation Champagne, la journaliste champenoise Sophie Claeys se confie sur trente ans de dégustations.

 

Dans l’univers du champagne, difficile de passer à côté de Sophie Claeys. Née dans la région, c’est pourtant presque par hasard que Sophie a fait du plus connu des vins effervescents son sujet de prédilection. À la fin des années 1990, la journaliste est engagée au service Reportages de L’Union, le canard local de référence, qui comprend une rubrique viticulture. Prise de passion pour ce jus d’exception, la jeune femme développe au sein du quotidien plusieurs pages qui lui sont consacrées, avant de voler de ses propres ailes, en donnant naissance à son propre site internet, dédié à l’actualité de la région. Incollable, Sophie Claeys s’est donc confiée à Vins Fins, en nous éclairant notamment sur les notions de cru et de terroirs.

 

Professionnellement, c’était un hasard, mais personnellement, que représente le champagne dans votre histoire ?
J’ai toujours baigné dedans ! Quand vous vivez dans la région, on ouvre une bouteille de champagne à n’importe quelle occasion, sans attendre d’événement marquant. Je viens d’une famille d’épicuriens qui aiment beaucoup le vin, mais ils ne m’ont pas transmis de connaissances. J’avais bien sûr des notions, en tête le nom des grandes maisons, des amis vignerons, mais il me manquait les subtilités, que j’ai apprises sur le terrain journalistique.

 

Premier cru, grand cru... en parlant de subtilités, comment les raisins sont classés pour donner naissance aux champagnes ?
Ces classements remontent au début du vingtième siècle. Cette qualification ne renvoie pas à un château ou à un lieu-dit, mais à des communes. A cette époque, la Champagne a été divisée en fonction de la qualité de ses raisins. Sur 300 communes viticoles, 17 ont obtenu la note de 100, pour avoir l’étiquette Grand Cru et 44 autres ont été cotées entre 99 et 90 pour être classées en Premier cru. La qualité des sols, la quantité de craie, l’exposition des coteaux ont permis d’élaborer les notes. Les raisins y sont – dit-on – meilleurs, et de fait plus chers. Mais il y a de superbes champagnes en dehors.

 

Les différents terroirs de la Champagne sont-ils associés à des spécificités gustatives ?
Selon la géographie, les vins de Champagne ont des caractéristiques qui varient, en effet. Dans l’Aube, qui est à la frontière de la Bourgogne, ils sont puissants, charpentés. La côte des Blancs est plutôt connue pour produire des chardonnays fins et élégants. La Montagne de Reims est célèbre pour ses beaux pinots noirs, eux aussi corsés et nerveux par endroits, du côté de Verzy et d’Ambonnay, notamment

 

Avec cette diversité, on doit pouvoir boire du champagne avec tout, non ?
J’aime le champagne, j’ai un rapport à ce vin qui est presque de l’ordre amoureux. Je n’ai pas besoin d’un met pour le trouver bon. Mais j’en déguste lors des repas, et je considère en effet qu’entre les blancs de noirs, les parcellaires, les rosés, les blancs de blancs, les millésimés… il y a de quoi en accorder avec tout, de l’apéro au dessert ! J’aime boire un vieux demi sec avec du foie gras, par exemple, et je suis amoureuse de l’accord champagne et fromages, auxquels il apporte de la légèreté. Avec du parmesan, c’est simplement extraordinaire. Sur un roquefort, je privilégie un champagne rosé.

 

En 30 ans de dégustation, vous avez dû vivre de grands moments…
L’un des plus marquants remonte au début des années 2000. J’écris sur le Champagne pour L’Union depuis un an et demi seulement, et je suis invitée à une dégustation historique chez Perrier Jouët. Je suis entourée de grands spécialistes, je suis là pour écrire un article. Les bouteilles remontent le temps, dans une verticale de 2002 à 1825, année du sacre de Charles X à Reims. Ce jour-là, j’ai dégusté la plus vieille référence répertoriée au monde. Et c’est à la fois mon plus grand souvenir et mon plus grand regret : sur le moment, j’ai couvert l’événement mais je n’ai pas appréhendé mesuré l’ampleur de ce que je vivais. Je n’ai compris qu’après que c’était magique.